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mercredi 27 octobre 2010

4 trucs faciles pour réussir son premier colloque

c’est bien connu, l’expert-conseil est réquisitionné aux quatre coins du canada pour étaler ses connaissances transcendantes dans des colloques universitaires. de retour d’ottawa, il explique à marcel, étudiant en philo, l’origine de son succès.
«je présente un article dans un colloque universitaire pancanadien la semaine prochaine. j’angoisse juste à l’idée de me retrouver devant mes pairs avec une présentation de qualité douteuse et mes talents d’orateur chancelants. que faire ?»
marcel, ne t’en fais pas. tout ce qu’il te faut, c’est une compréhension minimale des règles du jeu, car en effet, il ne s'agit que d'un jeu. en fait, ce n’est qu’une sorte de donjons et dragons grandeur nature avec un décorum ennuyeux, et sans épée en mousse.
voici quelques-unes des règles du code de conduite international des colloques universitaires (CCICU, duquel je suis l’auteur).
1 — présentation : afin de frimer et d’épater tes collègues, sache te présenter adéquatement. confiance et assurance constituent la clé d’une présentation réussie. présente-toi au colloque le dos droit.
pour bluffer la meute, localise une lointaine connaissance et n’hésite pas à faire des blagues d’intello (lire ici: plates) en riant à gorge déployée. les participants n’auront d’autre choix que de te considérer comme un gros joueur !
2 — allocution: en tant que conférencier, tu es en position de commandement devant ton assistance. lors de la lecture, fais des simagrées et fais glisser à répétition le stylo bille – que l’organisation t’aura fourni à ton arrivée – entre tes doigts. l’attention de ton auditoire captif sera détournée de ton propos grâce à ce prétendu tic !
n’oublie pas d’insérer des néologismes, des citations et des références à auguste comte afin de simuler la pertinence et la profondeur de ton propos. ce genre de pirouette intellectuelle rapporte dans les colloques et t’aidera assurément lors du cocktail de clôture (voir étape 4).
3 — question: rassure-toi, marcel, la période de questions, bien que hasardeuse par nature, obéit toutefois à des règles définies : les questions sont trop longues, touffues et imprécises. elles sont posées dans l’unique but de se faire valoir.
amorce toujours tes réponses en remerciant chaleureusement le public pour la question « précisément dans l’optique de ta présentation ». réponds vaguement à un aspect précis de l’intervention (que tu ne maîtrises pas), pour finalement revenir à un élément central de ta présentation (que tu maîtrises).
n’hésite pas à faire un lien boiteux avec l’actualité. tu pourras certainement intégrer à ta présentation sur démocrite quelques remarques sur les élections américaines de mi-mandat ou encore sur la souveraineté canadienne dans l’arctique.
4 — dégustation : tout colloque qui se respecte se doit d’offrir aux conférenciers un léger goûter, et parfois, un vin d’honneur. ne t’emballe pas, marcel, les verrines et autres bouchées fancy sont toujours farcies de discussions entre universitaires complaisants.
en fait marcel, lors des cocktails, les couteaux volent bas. ça se complimente pour se diminuer. reste donc à proximité de la bouteille de vin et garde-toi bien de ne pas reproduire cette attitude suffisante érigée en système par dans le monde universitaire cynique et désillusionné !
la semaine prochaine, l’expert-conseil se fera gauchiste car nous questionnerons la pertinence du fonds de bourses coeur de pirate pour les étudiants de brébeuf.
cette chronique n'est pas une présentation du pavillon paul desmarais de l'université d'ottawa et son auteur vous assure qu'elle ne fut pas rédigée sous le bâillon
texte publié dans quartier libre, vol 18, num. 5, le 26 octobre 2010

lundi 18 octobre 2010

les grands photographes

voilà qui exprime, en pas mal plus percutant, ce que je voulais dire sur les pseudo-photographes montréalais (http://bit.ly/cHopYv)

«[...] les grands photographes, avec leur prétention de révéler dans leurs clichés la Vérité de leurs modèles, ils ne révèlent rien du tout, ils se contentent de se placer devant vous et de déclencher le moteur de leur appareil pour prendre des centaines de clichés au petit bonheur en poussant des gloussements, et plus tard, ils choisissent les moins mauvais de la série, voilà comment ils procèdent sans exception, tous ces soi-disant grands photographes. [...] j'en connais quelques uns personnellement et n'ai pour eux que mépris. Je les considère tous autant qu'ils sont comme à peu près aussi créatifs qu'un Photomaton.»

-Michel Houellebecq, La carte et le territoire, 2010, pp.10-11.

dimanche 3 octobre 2010

octobre

le mois d'octobre est sans conteste le plus beau mois de l'année. du plateau mont-royal à charlevoix en passant par la venteuse terrasse dufferin à québec, on dirait que les paysages d'automne suscitent davantage l'émotion que ceux d'une après-midi de juillet ou d'une froide matinée de janvier. peut-être aussi est-ce juste moi? peut-être seulement le fait que, comme le dit sam roberts avec poésie, avec chaque mois d'octobre je vieilli d'une année... mais j'imagine que c'est plus que ça...

mes automnes se vivent avec un certain spleen, une fascination pour l'éclairage et une frilosité réconfortante. mais pourquoi cette drôle de disposition mentale me frappe-t-elle avec le retour d'octobre?

le premier janvier du travailleur et de l'étudiant étant le premier septembre, il est normal qu'après un mois de «retour aux choses sérieuses» et d'adaptation, nous ayons l'impression qu'octobre marque définitivement la période du «retour à la routine». toutefois une explication de ce «sentiment automnale» ne doit-elle pas être plus substantielle?

loin de moi l'idée de vous servir la légende romantique qui considère l'automne comme le moment de la mort ou pire, l'hibernation de la vie ou autres salades métaphoriques à la Lamartine (à la plage, t'as pognes-tu...?) pour moi l'automne c'est plutôt une période de grande paix intérieure, de stimulation intellectuelle, de bonne volonté, mais aussi d'émotivité et de nerfs à fleur de peau. en fait, comme on la désigne souvent, l'automne est une saison de couleurs, couleurs qui teintent notre quotidien, nos vies avant l'hiver.

c'est une saison de solitaire où il fait bon de déambuler dans les rues guindées de la métropole, aux flancs du Mont-Royal, écouteurs sur les oreilles, diffusant un disque de mogwai, sourire niais étampé aux lèvres.

c'est aussi une saison d'amoureux. les nuits sont fraîches, on dort les fenêtres entre-ouvertes et on se colle au réveil, sous une lourde pile de couvertures.

finalement, c'est probablement une saison de paradoxe. une saison où je me sens introspectif et jovial à la fois, sage et idiot et où je veux être seul sans être délaissé.

mais c'est avant tout la plus belle des saisons. comme ces soirées froides du mois d'août où on doit enfiler une veste à capuchon et un foulard, on se sent bien, au chaud et paisible en octobre.

samedi 2 octobre 2010

talent de photographe dans vot' boîte de crackerjack

dans les concerts montréalais, une nouvelle tendance émerge chez les spectateurs, tendance qui, je crois, est en lien direct avec l'étalement virtuel de nos vies via les blogues, facebook et autres flickr. quelle est-elle? dur à dire, pourtant un symptôme de cette tendance pernicieuse m'est apparu clairement hier soir: la prolifération des photographes improvisés!

les appareils numériques ont littéralement démocratisé la prise de photo, ce qui est une bonne chose. il coûte de moins en moins cher pour un bon appareil et victoire, plus besoin de se trimbaler avec des pellicules de rechange (je m'attends à cet effet qu'on rende disponible sous peu une carte mémoire de 1 tetraoctet!).

démocratisation donc. par contre ce n'est parce que les prix des appareils multifonction style «réflexe» descendent qu'il est donné à tout le monde de prendre de bonnes photos. et ce n'est pas non plus parce qu'on a accès à une carte mémoire de 8 giga pour un concert d'une heure 30 que nous devons prendre 12 photos pas bonnes à la seconde.

je peux comprendre que certaines personnes, volages de la postmodernité et de ces avenues 2.0, soient désireuses de garnir leur blogue et leur page facebook de photos de leur dernière soirée hip et funky quelque part dans le Mile-End. ce que je ne comprends pas c'est pourquoi certains fans paient un billet de concert pour passer la soirée à prendre des photos floues. gaspillage de temps et d'argent! pourquoi ne pas plutôt être attentif à ce qu'il se passe sur la scène et écrire un compte-rendu lucide du spectacle de la veille.

une image vaut mille mots qu'on dit? mille mots valent tant qu'à moi beaucoup plus qu'un paquet de photos croches, embrouillées et, de surcroît, prises en état d'ébriété.

n'est-ce pas paradoxal, la photographie a pour fonction de capturer pour l'éternité un moment arrêter de l'histoire. la photographie est un art, une vision du monde, une réflexion sur le présent, le passé et le futur. mais ce n'est pas tout, la photo c'est un aide-mémoire. un instantané. l'image a pour fonction de susciter une réaction en chaîne et de provoquer le souvenir. avec une seule photo du passage de pearl jam dans la métropole en 98, il est possible de se rappeler par exemple, qu'ils ont joué not for you avant le rappel, qu'ils sont revenu sur scène avec dirty frank (une rareté en passant) et que le gars assis à côté de moi portait une veste en jeans avec les manches coupées, fumait des craven-a et du coup, chantait vraiment comme une casserole.

que j'aie pris cette photo ou que je la retrouve dans un cahier de scrapbooking au fond ça ne dérange pas. l'important est que j'ai bel et bien un souvenir franc de cette soirée.

pour les websters (mettons), le concert est en fait accessoire. la salle de spectacle montréalaise est leur temple: sanctifiant les jeunes-gens, beaux, branchés et allumés. bref c'est le lieu de choix pour être vu par le gratin musico-artistique-cool pseudo-underground du 514. les concerts qu'on y présentent n'intéressent personne au fond. transis qu'ils sont par le petit écran de leur appareil photo, les fans médiatisent leur expérience de la scène alors qu'ils se trouvent à peine à 3 mètres de celle-ci.

cette attitude reflète le côté pervers du réseautage social, du 2.0 et de leur accès instantané à même un portable: par les avenues de la technologie nous en sommes venu à médiatiser notre expérience vécue. on se distancie de notre quotidienneté pour se projeter via un avatar, dans une plateforme virtuelle futile et fausse.
 
c'est dans cette logique je crois que 2000 photos laides sur un blogue deviennent plus intéressantes qu'un texte réfléchi. c'est peut être pourquoi aussi on achète un appareil photo dernier cri sans prendre le temps de comprendre comment ce dernier fonctionne (de toute façon on ne prendra pas plus le temps de prendre des photos, vous me suivez?).

à l'époque de la fibre optique on n'a plus le temps pour rien, pas même pour écouter lors d'un spectacle.

vendredi 1 octobre 2010

nul si découvert se mouille

après avoir vilipendé la semaine dernière l'ensemble de la profession journalistico-artistique montréalaise, l'équipe de nul si découvert se sent mal et veut réparer les pots cassés (tout en se refusant de faire dans la complaisance et de vous servir la recette cis à son tour: voir http://bit.ly/dqXKwv). en fait, il vous sera proposé ici une critique de disque originale, résolument subjective et exempte d'expressions vide de sens. ainsi, vous ne pourrez pas dire que notre équipe de rédaction ne fait pas preuve d'honnêteté intellectuelle dans sa démarche de dénonciation des chroniques-musicales-toutes-pareilles(tm).  

DD/MM/YYYY
Black Square (2009)

groupe à composition variable DD/MM/YYYY (prononcer day-month-year) propose un rock synthétisé dans l'ère du temps: voix aiguës, psychédélisme contrôlé, guitares incisives, production DIY et urgence dans le ton. il faut dire que dans le registre, le septuor torontois peut sans gêne lorgner une position enviable sur la scène indie canadienne aux côtés des we are wolves, holy fuck, japandroids et autres shout out out out out.

s'ouvrant par un mur de synthés et un boucan de batteries, bronzage, est la pièce toute désignée pour amorcer  le disque. l'intensité ne redescendra que sur le titre suivant, no life, titre «guitaristique», frénétique et puissant, précédant la tranquille et transitoire they. voilà la formule préconisée par day-month-year: chaque passage électrisant, chaque syncope se doit d'être accompagné d'un certain moment de synthèse, genre de pause avant un autre plongeon en apnée synthétique! (à noter que dans cette phrase il y a 3 mots commençant par syn... c'est fantastique!)

même si le groupe impressionne le plus dans infinity skull cube, où la batterie, jouée en rim shots, rythme les voix conjugué à une grosse ligne de claviers d'une autre époque, l'intensité n'est pas compromise pour autant sur les pistes suivantes.

alors que sirius et lismer ont un son malsain, quelque chose entre mars volta pour les contre-temps et holy fuck pour l'assaut de claviers, birdtown nous fait découvrir des saxophones dans une composition instrumentale des plus intéressantes. $50 000 guitar head pour sa part rappellerait les expérimentations du mahavishnu orchestra à supposé que John McLaughlin se soit perdu dans le Mile-End avec pour seul environnement sonore de vieux micro-sillons des beastie boys et des disques de 8 bit.

real eyes vient clore ce bordel sonore par son tempo endiablé et ses voix inquiétantes.

bref, black square est un album touffu, brouillon et livré sans fla-fla. il est également un incontournable pour le mélomane averti, friand de groupes inventifs et rentre-dedans! une armée de claviers, deux batteries, une guitare, une basse et un sax comme alignement partant, DD/MM/YYYY offre les frissons de non stop je te plie en deux des loups, sans les tounes de tabla plates et les acouphènes! bonne écoute!

4.5/5 
nb. pour l'équipe de nul si découvert une note d'album doit toujours frôler la perfection ou raser le fond du baril... la musique ne peut laisser l'auditeur attentif indifférent... c'est donc dire que 3/5 est le pire note qui soit...